mercredi 2 juillet 2008

Marrakech-Agadir (suite)



« A Douirane il y a une usine d’huile d’olive en ruine elle appartenait au français et au juif »
Je frémis. Cela pourrait correspondre, bien que je ne sache pas trop ce que le juif vient faire au milieu de mon usine. Papa ne m’en avait jamais parlé, bien qu’il a toujours eu d’excellentes relations aussi avec les juifs du Maroc, qui souvent étaient les banquiers du pays. Sans doute était il le propriétaire, car papa n’en était lui que le directeur
Demi tour vers Douirane à seulement quelques km. Sur place je demande à quelques personnes assises à une terrasse. Même histoire, une usine….. Celle du français et du juif…….. Ils n’hésitent pas très longtemps, l’un d’eux m’indique.
Devant mes yeux interloqués de crédulité, qui ne comprend rien à son explication moult fois répétée, il se propose de m’accompagner. Il monte dans la voiture et je tente de lui parler un peu, du temps, et de l’usine, il dit oui à tout ce que je dis, je comprends rapidement que je dois améliorer ce fichu vocabulaire Marocain. On descend vers le bas du village, vers la mosquée qui pointe son doigt vers le ciel comme pour me dire « vient par ici ! » Un dernier virage, notre guide n’a pas le temps de me dire quoi que ce soit, j’exulte, l’usine !!!!
« C’est elle, il n’y a pas de doute », je comprends soudainement la fébrilité de Christophe Colomb, découvrant l’Amérique.
Je remercie mon guide avec dans les yeux toute la jubilation du découvreur de cité perdue. Je ne sais plus ce que je dois faire pour le remercier. Je tente la même expérience qu’avec le vieux de tout a l’heure, il refuse, j’ai beau tout tenter, il refuse, et s’en retourne à pied vers sa maison. Je suis là comme un con de français qui ne comprend plus rien à ces gens. Et j’enrage ! Ni à moi-même d’ailleurs ! La leçon de tout à l’heure ne m’a pas suffit. Faudra bien que je me fasse expliquer comment cela fonctionne.
Quand un marocain demande ou mendie, on nous recommande de ne rien donner, du moins de l’argent, et cela me semble judicieux. Bien que je ne tenterai pas la thèse philosophique de l’argent vite est mal gagné. Allez expliquer cela à celui qui a faim. Mais quand un marocain vous rend service sans rien demander comment le remercier ? J’ai vite compris la leçon, d’abord et tout simplement le remercier avec le cœur, il saura vous comprendre. S’il a des enfants un cahier et des stylos, c’est le plus beau et utile des cadeaux. Souvent aussi l’inviter à boire un verre de thé en toute amitié pour lui faire remarquer que vous avez apprécié son geste, ce signe simple est un geste qu’il apprécie. Je pense. Au secours DR Mouhib et S.Abdelmoumene expliquez moi !!!
Douirane, l’usine, elle est là ! Devant moi ! En ruine certes, les toits ont disparus. Sans doute servent ils aujourd’hui à des gens par là qui sont venu les démonter pour en profiter un peux. C’est bien, et c’est juste, papa aurait aimé cela plutôt que de les voire entièrement effondrés.
Douirane, il n’y a pas de mot pour m’exprimer, je ne retrouve même pas mes larmes, trop sèches. Et puis je n’ai pas envie de me plaindre sur mon passé. Je suis heureux de vivre ce présent.
Douirane, il n’y a pas de mots, je ne retrouve que la gorge sèche
Douirane, il n’y a pas de mot c’est dedans que tout se passe
Douirane, je fixe devant moi cette immense carcasse déshabillée et maquillée par le temps de graffiti en trois langues, Marocaine, Française et Anglais. Impudique devant moi, honteuse de se montrer sous ce jour, moi son fils qui buvait jadis sous son ombre, son huile nourricière.
(PS si vous voulez d'autres photos double cliquez sur le diaporama)
a suivre!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

11 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour Patrick, j'imagine ton regard après tant d'année, je suis touchée et émue pour tes descriptions ! c'est véritablement émouvant, merci pour ton si beau partage en texte et en image!
Bisous

Pas a pas a dit…

bonjour evelyss
merci beaucoup de ces mots si sympas, je suis heureux que cela te plaise
patrick

Cergie a dit…

A Cergy, lorsque je me déplace, je fais partie des lieux, même si je côtoie des bandes avec des chiens et qu'il fait nuit, je ne risque rien.
Va expliquer ça. Lorsque l'on fait partie des lieux, on sait se comporter, on a sans doute respiré un air qui fait qu'on sait et on se reconnait étant semblables. Il suffit de s'absenter, de déménager et ce n'est plus pareil.

Tu as revu cette usine (ah l'huile d'olive trempé avec une bonne tranche de kesra) et surtout tu as été sur son sol et sous son ciel... Grâce à tes mots, nous sommes à coté de toi

Bon week end, Patrick

Anonyme a dit…

Bonjour Patrick, de voir ces ruines , çà me peine j'imagine ta déception et tous ces souvenirs qui ressurgissent. je continue la lecture;-)
Bises

Dr Mouhib Mohamed a dit…

Bonjour Patrick je ne pouvais visiter ton blog tous les jours à ccause de la fatigue ; je rentre esquinté du travail.Je me ratrappe aujourd'hui bravo pour tes billets émouvants .Qand au secour que tu me lance concernant la conduite à tenir face à un marcain qui te rends service , je crois que tu as bien compris les marocains ;ils ne cherchent que l'attitude que tu as eu instinctivement avec eux. Sur mon blog j'ai commencer la nouvelle dont je t'ai parlé (le monde de Aicha bassou).amitié

Pas a pas a dit…

Bonjour dr Mouhib
Je témoigne de ta grande capacité de travail mais aussi du temps que tu passes a l’association que tu présides, mais aussi de toute la passion que tu y portes
Alors je comprends aisément ton manque de temps, tes patient on bien plus besoin de ton temps que mes futiles blogs ; merci donc de ta visite
Merci aussi de m’avoir rassuré sur ma question,
Bravo sur ton nouveau travail, il me tarde de lire ton document, que je viens de voir en ligne, j’y vais
Myriam et moi te souhaitons ainsi qu’a ton épouse Zohra une très bonne journée
patrick

Pas a pas a dit…

Bonjour evelyss
non evelyss, je n'ai pas été déçu de retrouver l'usine en ruine; certes pour le bien de tous ,cela aurait ete mieux qu'elle fonctionne, mais ces ruine aussi m'on envoûtées , j'en parle plus tard reviens me lire
a bientôt

Pas a pas a dit…

Bonjour cergie
Je vois que tu connais la cérémonie du "gouttage d'huile" j'en parle un peu plus loin et aussi dans mon futur livre
Bises
patrick

lyliane six a dit…

Elle est toujours là, délabrée, mais pas démolie, que de souvenirs ont dû te remonter en tête!
ne l'as tu pas trouvée très grande, car quand on est petit, tout nous parait immense, c'est ce qui m'est arrivé avec la maison de ma grand mère, que j'ai eu la chance de revoir une dernière fois avant qu'on ne la démolisse.

Pas a pas a dit…

Bonjour lylianne
Et oui elle était immense quand j'étais petit et bien elle est vraiment immense
Tu as très bien vécu toi aussi le même instant en voyant la maison de ta grand mère, pour moi ce fut un moment inoubliable,
a bientôt
patrick

vincent a dit…

tu sais Patrick, l'attitude de ces marocains vient certainement du fait qu'ils habitent une village et non cette tentaculaire Marrakech. Comme chez nous, les villageois sont différents des gens des grandes villes.
ne crois tu pas?